Le PLM se simplifie-t-il ? C'est la question que nous avons posée à plusieurs intégrateurs PLM présents sur le territoire français. La réponse est unanimement oui. Réaction logique de la part de professionnels dont l'activité est de vendre du service et du conseil autour du PLM. On ne peut leur demander de se tirer une balle dans le pied. Mais ils étayent cette affirmation d'arguments solides et souvent incontestables.
Des outils PLM sur mesure…
Le PLM est avant tout une démarche organisationnelle visant à optimiser la conception, le développement et la fabrication des produits manufacturés. Pour cela, elle s'appuie sur un environnement logiciel : CAO, maquette numérique, réalité virtuelle, calcul, simulation numérique, et surtout gestion collaborative des données. Une dernière famille qui s'est vu attribuer progressivement l’appellation de "logiciels PLM", et qui constitue, il est vrai, l'épine dorsale d'une démarche de gestion du cycle de vie des produits. Et c'est ce type de solution qui posait le plus de difficultés jusqu'à maintenant aux entreprises qui s'aventuraient dans la démarche PLM. D'ailleurs, dans les premiers temps, celles-ci développaient elles-mêmes ces solutions. "Des outils sur mesures certes, mais qui exigeaient beaucoup de développements spécifiques pour les faire correspondre aux desiderata du client" détaille Sébastien Grau, Directeur Offres et Technologies de PCO Innovation. Et des logiciels difficiles à maintenir, rarement ergonomiques et peu ouverts sur les autres solutions ! C'est pourquoi les projets PLM étaient souvent longs, complexes et n'aboutissaient pas toujours au résultat escompté. Forte de cette expérience, la majorité des industriels se lançant dans le PLM s'est tournée vers les solutions du commerce.
… A des solutions pré-câblées
Trois ténors se sont partagés l'essentiel de ce marché du PLM jusqu'à maintenant : PTC, Dassault Systèmes, et Siemens PLM Software. En l'espace de dix ans, ils ont acquis les briques technologiques afin d'étendre la couverture fonctionnelle de leurs outils PLM. Une intégration qui a mobilisé les équipes pendant longtemps et qui n'est pas encore finalisée. C'est justement cette phase de stabilisation qui profite aujourd'hui aux utilisateurs à la recherche de la simplicité.
Les solutions actuelles sont en effet plus riches, mais aussi plus facilement configurables, sans développement spécifique, et les interfaces d'administration n'exigent plus de compétence informatique pointue, mais une bonne connaissance du métier. "En standard, Windchill, Enovia ou Teamcenter couvrent une très grande diversité de besoins. Ils sont de ce fait plus facilement déployés dans les entreprises" souligne Sébastien Grau. "D'ailleurs, dans une équipe projet typique PCO Innovation, nous avons divisé par deux, voire par trois le nombre d'informaticiens au profit d'experts métier". Progressivement, le PLM glisse d'un projet informatique à un projet d'entreprise. "Même les grands patrons connaissent aujourd'hui le PLM, ses enjeux, et plus personne ne remet en question le bien-fondé de la démarche" rajoute Michel Pimenta, Directeur Ventes et Marketing chez Airbus Cimpa.
Les dernières versions Windchill, Teamcenter, Enovia, mais aussi Audros PLM, Lascom PLM ou SAP PLM ont bénéficié de cet effort de la part des éditeurs. Comme l'explique Bruno Puelchoutres, Vice-Président de Keonys, revendeur et intégrateur des solutions Dassault Systèmes : "nous sommes passés de solutions type boîte à outils sophistiquées à des solutions métiers par "domaine de vols" gérant par module les nomenclatures, les échanges de fichiers CAO, les configurations, les projets, la maintenance, etc., puis récemment à des solutions verticalisées par secteur d'activité."
La nécessité de standardiser les solutions
Les outils de PLM se sont donc orientés vers une standardisation des pratiques industrielles à travers des modules pré-configurés Les éditeurs ont travaillé avec les industriels les plus avancés en matière de process pour établir des best-practices et les intégrer à leurs logiciels de PLM. Ils ont ainsi lancé sur le marché des packs spécifiques pour l'aéronautique/défense, le secteur automobile ou encore l'énergie, ou les biens de consommation. Ces solutions intègrent également les processus exigées par les règlementations en vigueur. Ce qui facilite d'ailleurs leur appropriation par les entreprises.
Outre l'aspect process, les éditeurs ont également progressé sur un domaine important : l'interopérabilité des logiciels. L'ingénierie concourante est devenue une réalité grâce, entre autres, à l'associativité des données entre les phases de conception et de fabrication en cas de modifications. Pour Pascal Bonnard, Directeur Innovation Industrielle chez Axemble, "il est plus facile désormais d'intégrer les outils de PLM dans le système d'informations des entreprises, et notamment de faire des liens avec les ERP". Axemble a d'ailleurs développé sa propre interface universelle EPDM Gateway permettant de paramétrer rapidement les échanges entre le logiciel de PLM et la majorité des solutions ERP du marché. Eric Negro, Global Director External Market d'Airbus Cimpa tempère ce constat : "il reste encore de la complexité pour faire dialoguer les solutions entre elles, d'autant plus que l'on intègre dans le PLM davantage de métier et donc plus d'outils."
On peut enfin souligner la simplification de la partie informatique des solutions PLM. Les solutions récentes permettent de connecter plus rapidement de nouveaux sites, de nouveaux partenaires à une organisation de type PLM. Les déploiement multi-sites avec une base de données centralisée sont monnaie courante.
Deux outils "PLM clé en main"
Teamcenter Rapid Start et Windchill PDM Essentials sont deux solutions récemment lancées sur le marché pour faciliter l'accès des entreprises au PLM. Ils illustrent la démarche de standardisation qui s’opère dans l'industrie vis-à-vis des process déployés.
– Teamcenter Rapid Startde Siemens PLM Software:C'est un Teamcenter complet en terme d'architecture, mais packagé pour les premiers lots d'implémentation PLM. Clé en main, il permet en une "journée d'installation" (dixit l'éditeur) de couvrir un périmètre fonctionnel comme la gestion des données multi-CAO en maquette numérique, la gestion documentaire d'ingénierie, les process de développement et de lancement produits (revue de projet, gestion de configuration, etc.), ou encore l'organisation de l'entreprise étendue avec des rôles déjà pré-configurés. Il s'appuie pour cela sur des pré-configurations établies sur les best-practices de chaque profession, et peut évoluer jusqu'à l'implémentation PLM complète. Il se distingue en cela de Teamcenter Express lancé il y a quelques années, mais limité à son périmètre initial de PDM d'entreprise.
– Windchill PDM Essentials : conçue sur les bases de PDM Link de PTC,et de Microsoft SQL Server, cette solution est destinée aux petites structures qui souhaitent gérer leurs fichiers CAO, quelles que soient leurs origines, et documents bureautiques. En standard, le logiciel intègre Creo View et Workgroup Manager permettant d'importer ces fichiers provenant de l'extérieur, de visualiser et d'annoter tous documents sans sortir de l'outil. Une cession peut accueillir jusqu'à 20 utilisateurs, typiquement cinq postes CAO et d'autres participants. Une licence flottante est commercialisée 2600 € par poste.
D'après l'éditeur, trois heures suffisent à installer cinq postes et à mettre en place les droits d'accès. L'outil dispose par défaut de processus déjà pré-câblés pour la gestion des fichiers, le contrôle des révisions ou leurs modifications. Mais, il peut être utile de faire appel aux services de son revendeur pour la migration de ses données vers Windchill PDM Essentials, et personnaliser les workflows en fonction de ses habitudes de travail.
Des industriels plus matures
Les outils sont plus simples à déployer, plus "scalables" en termes de fonctionnalités, plus "standards" donc. De leur côté, les clients ont gagné en maturité. Dans les secteurs de l'aéronautique ou de l'automobile par exemple, les précurseurs sont d'ailleurs sur des implémentations de seconde génération de PLM. Bruno Puelchoutres de Keonys : "Les entreprises sont plus réalistes sur la définition de leurs besoins et sur l'identification de l'existant. Elles sont aussi désormais persuadées de la nécessité d'homogénéiser leurs process de développement et de rationaliser les coûts, donc de déployer la démarche PLM. Une situation qui simplifie à tout niveau la mise en œuvre d'un projet PLM."
On le constate, les entreprises similaires d'un même secteur d'activité travaillent de la même façon pour concevoir un produit, organiser son développement, sa déclinaison en gamme, sa fabrication, etc. Il n'y a pas uniformité totale mais la loi des 80/20 est plus que respectée. Dans ce cas, il y a tout intérêt à adopter des solutions prêtes à l'emploi, quitte parfois à modifier à la marge certains process internes. Le cas d'Airbus est emblématique à ce sujet. Le programme de l'A380 a rencontré d'énormes difficultés techniques causées principalement par l'hétérogénéité des systèmes d'informations. Sur l'A350 XWB, le constructeur et son écosystème de développement ont unifié leurs méthodologies, leurs outils d'ingénierie et leur culture d'entreprise. Les retards constatés également sur ce programme furent imputables à des modifications tardives de fuselage et sur l'intégration de matériaux composites.
"Les déploiements sont plus faciles, car les entreprises ont une meilleure connaissance du sujet, des enjeux et de l'apport du PLM pour leur activité. D'une manière générale, il y a moins de résistance au changement de la part des utilisateurs" détaille Michel Pimenta Directeur des Ventes & Marketing d'Airbus. Même constat pour Bruno Puelchoutres de Keonys : "Nous sommes aidés également par l'arrivée dans les entreprises de jeunes ingénieurs formés aux problématiques du PLM, de la mondialisation de l'industrie, de la gestion de projets en multi-sites, etc. ce qui facilite largement la prise main de projet PLM en interne."
Intégrateurs PLM : l'expérience paye
Enfin, la simplification est venue des intégrateurs PLM. Ils se sont multipliés et ont eux aussi gagné en expérience. Le secteur devenu mature a attiré des acteurs de poids comme Capgemini, et de nouveaux venus comme l'Indien Tata Technologies. Une concurrence plus forte, qui logiquement pousse à l’excellence pour rester concurrentiel. Pascal Bonnard Directeur de l'Innovation Industrielle chez Axemble : " Auparavant, le service autour d'un logiciel était complexe et long. Désormais, le déploiement s'effectue à travers un plan de cadrage établi et des procédures explicites.
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