Chaque année, à la fin du mois de juin, l’Ecole Polytechnique
de Palaiseau accueille le forum Teratec, rendez-vous de la
simulation numérique. Petit tour subjectif des nouveautés
remarquées au hasard des stands, notamment des plus petits,
et de l’un des ateliers thématiques…
Les stands au fil de l’eau
Une première découverte sur le stand de
la société Cadlm, à travers son nouveau
logiciel Odysée disponible depuis l’année
dernière. Celui-ci couvre deux domaines
proches : le traitement Big Data de données
industrielles, et l’analyse de données
numériques issues de l’expérimentation
réelle, de la simulation et de l’expertise.
Il est ainsi employé pour construire des
applications métiers pour, par exemple,
exploiter des données de mesures,
comprendre le comportement de clients,
déterminer les causes d’endommagement
de pièces aéronautiques, optimiser une
chaîne de production, ou encore exploiter
des campagnes d’essais.
Odysée se distingue par sa capacité à
combiner des données de simulation,
des résultats de mesure et de l’expertise
métier, grâce à des méthodes de fusion de
données (data mining) et d’apprentissage
automatique (machine learning).
Autre nouveauté sur le stand de l’intégrateur
hardware Carri Systems, la toute jeune
société OpexMedia qui propose une solution collaborative d’affichage distant.
Ubiquitous Share Environment (USE) est
en fait une station de travail virtualisée
accessible depuis n’importe quel type de
terminal. On peut ainsi réaliser une revue de
projet entre personnes distantes avec une
interaction permanente de chacun sur le
modèle exploré, réaliser du co-design avec
un partenaire à l’autre bout de la planète,
ou encore prendre le contrôle à distance
de sa station de travail.
L’originalité du produit est qu’il ne nécessite
aucun plug-in sur les postes concernés.
USE est une architecture WebRTC qui
assure le transfert des seuls pixels entre
les postes clients et le serveur virtualisé
distant. Ce dernier crée un tunnel sécurisé entre l’hébergeur des licences et données,
et les clients. Ces derniers peuvent accéder
aux logiciels à travers un navigateur comme
Chrome ou Firefox. USE est commercialisé
sous forme de licence flottante en fonction
du nombre de session ouverte en parallèle.
Numeca International est un éditeur
belge spécialiste de la CFD et de son
interaction avec les autres physiques.
Ses logiciels couvrent une large gamme
d’applications en hydrodynamique, et
aérodynamique interne et externe. Sur son
stand, les visiteurs pouvaient découvrir
sa nouvelle suite logicielle permettant de
réaliser un design complet de machine
tournante grâce à son partenariat réalisé
avec Concepts Nrec. De la feuille blanche au design 3D, de la caractérisation de
l’écoulement à l’optimisation du design,
le tout dans une seule chaîne de calcul.
L’entreprise propose également ses
solutions sur le cloud avec des partenaires
comme UberCloud et CPU24. Elle dispose
enfin d’une application de soufflerie
numérique capable de simuler précisément
le comportement de profils 2D directement
sur un smartphone ou une tablette sous
Android et iOS.
Cloud, SaaS
et pay per use
Du côté de la R&D, IFP Energies Nouvelles
(Ifpen), acteur public de la recherche et
de la formation dans les domaines de
l’énergie, du transport et de l’environnement
innovait dans le domaine des transports.
Le laboratoire présentait un logiciel de
simulation grandes échelles (SGE) pour
les chambres de combustion, accessible
sur le mode SaaS. La technique SGE est
particulièrement adaptée pour prédire les
instabilités de combustion et les variabilités
cycliques de moteurs thermiques,
L’approche d’utilisation via un SaaS pour
la SGE est aujourd’hui proposée dans le
cadre du Consortium Access-LES. Elle
permet de réaliser les mises en données,
les calculs et leur analyse en adaptant
les ressources HPC selon les besoins de
chaque utilisateur.
Le SaaS et le cloud se pose d’ailleurs
comme une tendance forte désormais chez
tous les éditeurs. Une démarche opérée
par Cd-adapco par exemple il y a déjà
plusieurs années à travers la solution SaaS
Extreme Factory de Bull. Mais d’autres
suivent désormais. Altair Engineering a
lancé deux offres : Hyperworks Unlimited
Physical Appliance en cloud privé et Hyperworks Unlimited Virtual Appliance
en cloud public. Dans le premier cas,
c’est une solution utilisable sans limites
sur la tarification des licences, installée
chez le client et totalement administrée
par Altair. L’offre est commercialisée sous
forme de leasing de trois ans. La seconde
proposition est une infrastructure similaire
mais hébergée dans un cloud public, pour
l’instant Amazon Web Services.
Ansys, lui, vient de lancer Elastic Licensing.
Un modèle de licence en paiement à l’usage
qui s’applique à tout son portfolio. Proposé
aux côtés des modèles traditionnels de
location (lease) ou de prépaiement (paidup),
et des offres cloud, Ansys Elastic
Licensing offre avec une seule licence,
un accès horaire à toute la plateforme
multiphysique de l’éditeur. Les clients
dimensionnent leur pool de licences en
location ou prépaiement en fonction de
leur charge habituelle de travail et font
des ajustements pour les utilisateurs
occasionnels de façon à répondre à des
pics de demandes.
On citera pour finir une autre solution
facilitant la démocratisation de la
simulation numérique, l’offre de simulation
multiphysique Comsol en mode Serveur.
Celle-ci permet de déployer des workflows
de simulation construits par les experts
d’un domaine aux collègues de l’entreprise,
aux autres départements, voire à leurs
clients à travers le monde.
A l’occasion du forum Teratec, nous avons
assisté également à l’un des nombreux
ateliers qui portaient sur les liens entre
objets connectés, infrastructures IoT et
HPC. Dans le domaine de l’IOT, la simulation
numérique devient en effet indispensable à
trois niveaux : celui des systèmes dans
lesquels s’intègrent les objets, des objets
eux-mêmes pour valider leur réponse au
cahier des charges, mais aussi celui des
infrastructures IoT véhiculant les données
et permettant leur exploitation.
Jumeau numérique et
maintenance prédictive
Bernard Dion, directeur technique de la
BU Systems d’Ansys a ouvert la session
en montrant comment la combinaison
des méthodes d’analyse prédictive et
de simulation des systèmes (MBSE pour
Model Based Systems Engineering)
permettent dans le contexte de l’internet
des objets industriels d’améliorer la gestion
de ces équipements tout au long de
leur vie. C’est pourquoi l’éditeur travaille
à l’élaboration de nouveaux modèles
réduits de composants physiques.
Exemple : un moteur comportant en
entrée des températures et une vitesse de
rotation, et en sortie son comportement
thermodynamique, avec un temps de
résolution du problème fluide de quelques
secondes. « Cela permet de modéliser
des systèmes intelligents ou des objets
intelligents au sein d’environnements
connectés afin de réaliser de la simulation
numérique prédictive de ces objets
connectés » explique-t-il.
Ansys et GE se sont d’ailleurs associés
pour exploiter les outils de simulation
du premier sur la plateforme cloud
Predix de GE destinées à l’analyse de
données. L’objectif est de mettre au
point un outil prédisant les défaillances
des objets connectés. A travers lui, les
éléments physiques d’un équipement sont
connectés à leurs jumeaux numériques.
Si une valeur d’entrée du système est
modifiée, une simulation est lancée en
interactif pour découvrir l’impact de cette
modification à plus ou moins long terme sur l’équipement. Exemple : on ferme une
vanne sur une installation complexe. Le
modèle numérique lance un calcul fluide
de la cavitation de la pompe directement
concernée et détermine le risque de
défaillance de cette pompe.
L’IoT au service
de la médecine
Le calcul numérique peut se nicher là où
on ne l’attend pas, en l’occurrence dans
les chaussettes…. Mais pas n’importe
quelles chaussettes : un modèle connecté,
capable de prévenir des ulcères plantaires.
« Cette maladie due notamment au diabète
est responsable d’une amputation toutes
les 20 secondes dans le monde. En plus
du coût humain, le coût financier atteint
11 milliards de dollars rien que pour
les USA » explique Vincent Luboz de la
société Texisense qui lance ces smarts
chaussettes.
L’entreprise a donc utilisé largement
la simulation numérique pour créer un
modèle en éléments finis des pieds de
nombreux patients. Un clone numérique
biodynamique permettant de modéliser la
pression exercée sur chaque zone selon les
activités et d’en déterminer la déformation
du pied. Sur ces travaux, l’équipe de
Vincent Luboz a développé un capteur de
pression textile. Intégrés à des chaussettes,
ces capteurs jouent le rôle d’une seconde
peau sensitive qui permet de détecter les
situations à risques pouvant provoquer
une plaie de pression. Les chaussettes
calculent périodiquement la déformation
des tissus internes. Le dispositif envoie
une alerte vibro-tactile au porteur en cas
de surpression ponctuelle ou lorsque la
dose de contrainte accumulée au cours de
l’activité journalière est excessive.
Ces dispositifs s’adressent aux personnes
privées de leurs capacités somatosensorielles
de façon permanente ou
temporaire, ou se trouvant dans une
situation de mobilité limitée. Notamment,
les personnes diabétiques, amputées
et paraplégiques sont particulièrement
concernées.