Avec les confinements, les modèles traditionnels de travail ont volé en éclat. Désormais la diversification et la décentralisation des espaces de travail sont devenues la règle. Les entreprises doivent s’habituer à avoir des collaborateurs travaillant dans une multitude de localisations (bureaux, maisons, espaces de coworking, transports, hôtels, clients, etc). Encore faut-il pouvoir gérer cette situation hybride, tant d’un point de vue allocation d’espaces et de moyens, que d’un point de vue ressources humaines. Un défi auquel s’attaque la start-up Semana.
« Le travail, ce n’est plus qu’au bureau ! », constate Albert Reynaud, PDG et co-fondateur de la start-up Semana, née en avril 2020 au sein de l’incubateur Station F. Une expérience qu’il a lui-même vécu lors du premier confinement avec Valerio Volpati, l’autre co-fondateur de Semana, alors qu’ils travaillaient sur un projet autour de la mobilité des personnels au sein des entreprises. « Nous avons tout de suite compris que plus rien ne serait comme avant. Du coup, nous avons décidé d’adapter le logiciel que nous étions entrain de développer à cette nouvelle donne. »
En effet, alors que la mobilité était encore l’exception début 2020, elle est vite devenue la règle avec les confinements. De plus, d’individuelle elle est devenue collective, ce ne sont plus quelques individus qu’il faut gérer en déporté à l’extérieur de l’entreprise, mais l’ensemble des équipes de projets réparties dans leurs différents domiciles, avec en plus des retours réguliers en entreprise. Il fallait donc pour les services Ressources Humaines gérer des calendriers de présence (qui est où, qui vient quand…), ainsi que des locaux et des équipements dans le respect des règles sanitaires.
Gérer le travail hybride et le Flex-Office
Semana a aussi vite compris qu’il allait y avoir un enjeu autour de la rationalisation des espaces de bureau. Les entreprises constatant que le télétravail allait forcément perdurer, au moins pour partie, même après la fin des confinements sanitaires, elles ont débuté une réflexion sur l’adaptation de leurs locaux en termes de surface, mais aussi de moyens mis à disposition des salariés. C’est le Flex-Office ou Flex-Desk.
« La singularité de notre logiciel éponyme, qui fonctionne en mode SaaS dans le Cloud via un simple navigateur sur de multiples plateformes (PC, tablette, smartphone…), est de pouvoir mêler et coupler la gestion du télétravail avec la gestion des espaces dans l’entreprise, car elles seront maintenant indissociables l’une de l’autre. »
Le travail sera maintenant hybride, mêlant travail au bureau et plusieurs jours de télétravail, suivant un mode qui sera variable d’une entreprise à l’autre. Suivant le secteur concerné, les besoins, les capacités et les possibilités seront excessivement différents. « Un développeur de logiciels, un projeteur en mécanique et un commercial n’auront pas les mêmes besoins et les mêmes attentes. De même, si vous avez beaucoup de séniorité ou de stagiaires, le rapport au télétravail variera énormément d’un salarié à l’autre. L’enjeu pour les entreprises est d’arriver à granulariser et personnaliser leur organisation du travail, pour s’adapter à ces différents besoins. Il faut aller au-delà de la moyenne pour appréhender la diversité et l’hétérogénéité des cas de figure. »
Demain nous irons au bureau pour échanger avec des collaborateurs, à la maison pour rédiger un rapport et dans un coworking au centre ville pour rencontrer des clients. L’ensemble de ces espaces constitueront notre bureau.
Gérer les hommes et les m²
Le point fort de Semana est d’être capable d’organiser les espaces avec la réservation de bureaux, de salles de réunion, de moyens (vidéoprojecteurs, imprimantes…), en suivant des règles d’occupation prédéfinies, mais surtout de faire la liaison avec des référents RH en autorisant de multiples paramétrages. Ce peut être le nombre minimum et maximum de jours de présence et de télétravail, les jours fixes de présence, les règles de rotation et de distanciation, l’organisation des équipes en communautés pour faciliter les présences simultanées, les priorités des entreprises, les préférences individuelles, etc. Il faut donc mettre en perspective les éléments traditionnels d’organisation des espaces avec toutes ces considérations RH. « Il faut pouvoir gérer à la fois les mètres carrés et les hommes pour faciliter le travail des équipes autour d’un projet. »
« On le sent dans les contacts que nous avons dans les entreprises, historiquement ces outils étaient l’apanage des Services Généraux, aujourd’hui ils sont du ressort des services RH, en liaison avec les responsables immobiliers. C’est symptomatique de la situation actuelle, ces deux sujets ne peuvent plus être dissociés, il faut pouvoir gérer à la fois le télétravail, les locaux, ainsi que les moyens matériels et logiciels mis à disposition des collaborateurs. Il faut pour cela s’intégrer aux solutions déjà en place dans les entreprises, qui n’ont pas attendu la crise sanitaire pour gérer leurs personnels et leurs locaux. On a beaucoup investit sur l’intégration que peut proposer Semana avec les outils existants des entreprises dans les mondes Google et Microsoft pour la gestion et l’authentification des utilisateurs ou la synchronisation de calendriers par exemple, mais on peut aussi se synchroniser avec des outils de communication comme Slack, très présent dans les start-up. On va aussi s’intégrer avec des outils RH comme ceux de Lucca. »
Répondre aux demandes spécifiques
Semana gère aussi les ‘‘attributs de desk’’ tels des moyens matériels spécifiques : accès à des logiciels d’ingénierie ou des grands écrans graphiques haute définition par exemple, en assignant des zones de locaux à certaines équipes. Le tableau de bord de Semana permet par exemple de gérer des requêtes telle : « J’ai besoin de réunir ma communauté tel jour au bureau dans une zone silencieuse disposant d’un accès à tel logiciel de revue de projet, d’un vidéoprojecteur et de X écrans haute définition, avec en plus un accès handicapé ».
Des investisseurs séduits
On l’a vu, l’objectif de Semana est bien d’appréhender toutes les options possibles d’un nouveau mode de travail de plus en plus hybride, afin d’offrir aux entreprises et à leurs collaborateurs le moyen de gérer plus de flexibilité dans leur rapport à l’espace de travail, tout en préservant la cohésion des équipes, leur capacité à collaborer et in-fine la productivité des entreprises. Une ambition qui a séduit les investisseurs puisqu’après un premier tour de financement de 90 k€, la start-up vient de lever plus de 600 k€ auprès de Entrepreneur First, de Business Angels et de la BPI, pour accélérer son développement produit et commercial.